Port du casque au Mali : Une mesure nécessaire, mais difficile à appliquer

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Un acte vital, reconnaissent plusieurs personnes parlant du port des casques de protection. Pourtant, la population malienne a du mal à s’y adapter. C’est donc un mal nécessaire peut-on dire, et cela à cause de quelques difficultés qu’il faut passer en revue.

Le code de la route rend obligatoire le port du casque de protection pour les conducteurs d’engins à 2 et 3 roues, ainsi que pour leurs passagers, à travers l’article 27, alinéa 1 du décret n°99-134/P-RM du 26 mai 1999. Malgré cette obligation concernant le port du casque, l’Etat malien n’a jamais pu mettre en place une politique pour faire respecter cette disposition du code de la route de manière durable.

Pendant le régime de Moussa Traoré, l’Etat avait rendu le port du casque obligatoire, mais la chute du régime a été une occasion rêvée pour les populations de se débarrasser de cette imposition.  Ensuite, le régime d’ATT en 2008 et puis le gouvernement de transition dirigé par Cheik Modibo Diarra en 2012, avaient tous tenté la même opération sans succès. A cela s’ajoutent d’autres tentatives qui ont eu lieu en 2019, 2021 et en aout 2022 sans aboutir à une application effective de la règlementation concernant le port du casque.

Pourtant, le port du casque reste une nécessité absolue. Il est vital, car il s’agit d’un geste qui sauve la vie.  « Avant d’être obligatoire et une mesure de citoyenneté, je pense que le port du casque est d’abord une mesure de protection pour les conducteurs de moto et leurs passagers », souligne Dr Bréma Ely Dicko, sociologue, professeur à l’université des lettres et des sciences humaines de Bamako.

Malgré la reconnaissance de cette nécessité absolue par une grande partie de la population, comme il ressort des témoignages recueillis, on s’interroge sur les échecs successifs de tous les régimes et gouvernements.

Pour le sociologue DICKO, il y a différentes raisons, et tout dépend du contexte et de la manière dont la mesure a été prise par les autorités. Pour mieux cerner les contours du problème, il est nécessaire de passer en revue les principales difficultés relatives au port du casque.

Un moment mal choisi, car la vie est chère

L’annonce initiale des autorités de la transition malienne relative à la décision de rendre obligatoire le port des casques a suscité au sein de l’opinion nationale des interrogations et des réactions qui, pour la plupart, ne sont pas positives. Certains pensent que le moment de cette décision est mal choisi, compte tenu de la vie chère. Il s’agit surtout d’un moment où les citoyens se plaignent de la hausse des prix des produits de première nécessité. « Je ne doute pas de la nécessité du casque, mais ce n’est pas une priorité de l’heure, on a du mal à avoir le pain, la vie est actuellement chère pour de telles décisions ». C’est ainsi que s’exprime Abdoulaye Sangaré, un commerçant. Assan Sissoko, une veuve et mère de 6 enfants ajoute que le « temps est dur, le gouvernement doit vraiment se limiter aux priorités ». Acheter 4 casques pour ses enfants qui ont chacun une moto est une chose secondaire pour elle. Plusieurs autres témoignages sur le port obligatoire des casques de protection en 2023, utilisent des arguments basés sur la vie chère.

Mais pour le journaliste Lassine Traoré « c’est étant vivant qu’on cherche à manger ».

Prix des casques

Pour certains, cette décision est une bonne initiative, mais c’est l’occasion pour les commerçants de doubler ou tripler même le prix des casques. Ils proposent que les autorités tiennent compte de la règlementation des prix des casques, pour que les vendeurs ne profitent pas de la situation.  Safi témoigne qu’elle a acheté « un casque à 10.000f l’année dernière, mais que ce même modèle de casque est vendu aujourd’hui à 15.000f ou même plus ». D’autres personnes rejoignent aussi ce dernier témoignage en mettant en avant la pauvreté. Mais selon le sociologue DICKO, « On ne serait quand même pas capable d’acheter une moto à 300000 ou 400000 FCFA, mais être incapable d’acheter un casque à 7500 F ou 15 000 F ».

Deux casques, une moto

Concernant le port obligatoire des casques, il est souligné qu’en plus des conducteurs d’engins à deux ou trois roues, que leur passager aussi doit porter le casque. Ce qui sous-entend que chaque moto doit obligatoirement avoir deux casques, ou bien le propriétaire doit renoncer à prendre un passager. Une partie de la population malienne s’est plainte de cet aspect, car pour elle, ce n’est pas logique d’acheter deux casques pour une moto. « Je me suis débrouillé pour en acheter un pour moi, mais pas question d’en acheter deux », se plaint ainsi Abdrame Maïga, un étudiant.

Idem pour Fatouma Sangaré : « Impossible pour moi de prévoir le casque des passagers, j’ai déjà des difficultés à acheter 4 casques pour mes 4 enfants qui ont tous une moto ».

Des maladies possibles ou des difficultés liées aux coiffures

Certains estiment que le port du même casque par plusieurs personnes peut entrainer la transmission de certaines maladies, en plus de la mauvaise odeur.

Parlant toujours des passagers, les motos-taxis sont les plus concernées. Chez elles, ce sont les clients qui refusent de porter les casques de protection. Certains d’entre eux pensent qu’ils peuvent avoir des maladies en portant ces casques qui sont portés par tous les clients. Quant aux femmes, certaines d’entre elles craignent généralement pour leur coiffure. Adama KEITA, un conducteur de mototaxi, nous explique que son casque prévu pour les clients est finalement devenu une charge pour lui. « À chaque fois que je tends le casque aux clients, ils me disent que c’est bon, qu’ils ne vont pas le porter. Pour cela, je ne sors plus avec deux casques ». Il ajoute : « Les clientes disent toujours que leur coiffure ne leur permet pas de porter le casque ou encore que ça cache leur coiffure ». Mais Dr Bréma Ely Dicko pense que cet argument ne tient tout simplement pas, car pour lui, au moment où on choisit de faire certaines coiffures, on peut donc prendre des taxis ».

Le gouvernement de la transition actuelle s’est lancé dans une tentative d’application de la disposition en question, mais d’une autre manière, en se basant surtout sur des campagnes de sensibilisation. Pour la réussite de cette campagne relative à l’application de la réglementation sur le port des casques, d’autres personnes ou organisations et plus précisément l’Association des Blogueurs du Mali (ABM), ont décidé d’accompagner le gouvernement. Mais pour sa réussite, une bonne analyse des difficultés énumérées ci-dessus s’avère nécessaire.

Koumba Coulibaly

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