Si j’avais eu le pouvoir de Hiro Nakumura

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Longtemps, j’ai cherché les mots et la force pour écrire ce texte mais à chaque fois que je griffonne quelque chose, une certaine émotion me submerge. Les mots qui ont toujours été mes meilleurs amis, qui m’ont tenu compagnie dans mes moments de solitude et d’égarement, durant mes plus grandes joies et mes peines me fuient et me laisse dans le tourment. Et pourtant il me faut écrire, pas que pour écrire mais pour me libérer. Fatou Diome avait raison de dire que l’écriture est un exutoire.

Alors, voilà, il y’a quelques semaines, je recevais mon diplôme de la licence à l’Ispric. Ce moment pour tout étudiant est symbolique car est la concrétisation de plusieurs années d’efforts, d’acharnements, de travail et de difficultés. Mais à ce moment précis où j’étais au pupitre et que je m’adressais à tous ces diplômés.

 

Je ne pensais à rien de tout celà. Je ne voulais qu’une chose, c’était de capturer ce moment. Capturer cet instant et remonter le temps, avoir le pouvoir de Hiro Nakumura, faire un tour dans le passé et montrer la photo de ce moment au nouveau bachelier que j’étais en 2016. Je lui dirai : regardes cette photo et rassures toi, tout ira bien dans quelques années.

Je sais que tu as la tête remplie de rêves, que tu veux changer le monde, que tu n’avais d’amis que tes cahiers et tes livres. Que les exercices étaient devenus ton quotidien. Que pour toi, la réussite se résumait à aller étudier à l’extérieur. Que de jours et de nuits, rien ne te hantait plus que l’idée de rester au Mali. Alors que les gens célèbrent leurs joies, au fond tu es là mais tu te poses juste ces questions : Que vais je devenir ? Que me réserve l’avenir ?
Tu as tellement peur, je le sais parceque je suis toi. Tu te dis : Je ne sais rien faire si ce n’est étudier et si ça ne marche pas : Que vais-je devenir ?

Ce que je vais te dire te fera mal mais écoutes moi attentivement, tu n’iras pas à l’extérieur pour étudier. Ta mention ne te le permet pas, tu as beau attendre le ciel,des portes ne s’ouvriront pas. Tu as été cherché tes notes, courir par ci et par là, envoyer par ci et par là des documents car au fond malgré tout ce qu’on te dira, tu persisteras en pensant que tu auras ta chance. Que Dieu ne permettrait pas que tes efforts soient neants, qu’il a vu tes nuits d’insomnies dans cette chambre jusqu’à 3h du matin où ta grand-mère Aissata te demandait d’aller dormir. Que Dieu a vu tes sacrifices, ces moments où tu n’étais pas là, ces endroits où tu étais absent, ces personnes avec qui tu voulais tant être mais tu n’étais jamais là. Ce visage que tu aimais tant mais que tu peinais à voir parceque tu voulais aller ailleurs, si seulement tu savais que bientôt elle s’en ira et son absence te suivra tout au long de ton chemin.

Si j’avais eu le pouvoir de Hiro Nakumura, je serai revenu te montrer cette image.

Et te dire très tôt avant même ce foutu bac : sors de la maison, laisses tes cahiers et tes livres, va profiter de la vie. Cherie celle que tu aimes plus que tout. Que la vie ne se résume pas à un examen. Profites de chaque instant qui te reste dans cette ville que tu aimes tant, ton chez toi car demain, tu y seras un étranger . On te montrera du doigt pour dire l’autre.

Essuies tes larmes, tu sais l’erreur que nous commettons, c’est de tout prévoir dans nos têtes et se dire obligatoirement que tout doit se réaliser. On oublie que nous n’avons pas notre destinée en main. Que nous ne sommes que des pions sur un échiquier. Que l’homme propose mais que Dieu dispose. Que nos destinées que quelque part ont déjà été tracé.

 

Si j’avais eu le pouvoir de Hiro Nakumura, je serai revenu te dire sur ce banc à la faculté publique où tes larmes coulaient presque, je te montrerai cette photo et je te dirai : surtout ne pleures pas car tout ira bien. Je sais que tu as tellement de rêves, que tu es soif de reconnaissance sans savoir pourquoi, tu as envie que le monde te voit, saches que tu es là. Tu veux briller de mille feux et pourtant tu ne vois aucune porte s’ouvrir. Tu a tellement d’ambition qu’il t’arrive de ne pas dormir le soir.

À défaut d’aller à l’étranger, tu t’es dit, je ferai une université privée. J’étudierai ce que j’aime et trouverai mon chemin. Il n’ya pas de concours que tu n’as pas fait : L’ IUG , IP-Smart. Il n’ya pas de portes où tu n’as été demandé, à Ispric, je t’ai vu prendre des renseignements. Tu as couru en vain mais nul part, les portes ne s’ouvraient. Et tu avais mal, tellement mal que pour toi, la vie ne se résumait plus à rien. Tes rêves, tes efforts, tes livres, tes exercices, tes sacrifices n’ont servi à rien. Tu pensais surtout à la confiance et au sacrifice de tout ce qui se sont battus pour toi. Te voilà seul assis sur ce banc avec mille pensées, mille déceptions, le monde continue de tourner malgré ta douleur. Tu voudrais que tout s’arrête, tout absolument tout.

Où va la douleur de ceux qui se sentent abandonnés par le ciel, pour qui toutes les prières n’ont plus de réponses et que les larmes à force de couler ont disparu de leurs yeux. Où va leur souffrance, qui les écoute, leurs pleurs, leurs gémissements, leurs cris peuvent effondrer le monde.
Et tant de douleur en un homme, en un cœur, c’est s’adonner au désespoir de lendemains sans avenir.

À ce moment là où toutes ces pensées obscures te traversaient, où tu pensais endurer toutes les peines du monde, je te dirai : regardes cette photo et rassures toi, tout ira bien. Tu as maintes fois voulu abandonné l’université, tout laisser derrière toi, rentrer chez toi sans savoir ce que tu vas devenir mais la peur t’a toujours retenu, toi qui ne sais rien faire si ce n’est aller à l’école. Sur ce chemin que tu empruntes chaque matin, je te vois.

Essuies tes larmes, lèves toi et saches que tout ira bien, tu as été injuste envers celui qui donne, qui fait et défait tout dans cette vie. Ton impatience et ta soif de grandeur t’ont mené à emprunter tant de chemins. Tu ne t’en sortiras pas toujours indemne tu garderas à jamais certaines cicatrices.

 

Tu es là aujourd’hui dans cette salle, tourmenté plus que jamais, à un pas d’abandonner. Saches que tout ira bien, que tu trouveras ta voie, ton chemin. Que toute cette douleur disparaîtra et ne doutes jamais car Dieu est juste.

Si seulement j’avais eu le pouvoir de Hiro Nakumura, je serai revenu te voir pour t’apporter cet espoir et cette sérénité dont tu avais tant besoin.

Yehia Boré

 

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