L’application de la Loi N° 052, le Wanep en fait son cheval de bataille
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Au Mali, il est difficile de voir les femmes aux postes de responsabilités. Il existe une certaine opinion au sein de la société malienne qui confine encore la femme au foyer, la considérant de fait, comme uniquement destinée aux tâches ménagères et de procréation.
Alors que la constitution malienne du 25 février 1992 garantit les mêmes droits aux citoyens des deux sexes sans discrimination et proclame dans son préambule entre autres, la défense des droits de la femme et de l’enfant. Malgré la garantie constitutionnelle, la situation des femmes s’est révélée peu reluisante. C’est partant de là qu’une loi a vu le jour en 2015, communément appelé loi 052 sur le genre.
Qu’est-ce que la loi n° 052 ?
La loi N°2015-052 du 18 décembre 2015 est la loi qui institue des mesures pour promouvoir le genre dans l’accès aux fonctions nominatives et électives. Cette loi fixe à 30% le quota de représentativité du genre dans les postes électifs et nominatifs. En théorie, il s’agit d’une avancée notable mais la réalité du terrain est loin d’être reluisante.
État de la loi n° 052 au Mali
La loi sur le genre a fait l’objet de nombreuses violations depuis son entrée en vigueur en 2015. Selon Madame SANOGO Gnagna Traoré, chargée de programme femme, paix et sécurité à Wanep-Mali : « depuis la promulgation de cette loi, on n’arrive pas à atteindre le quota des 30% pour les femmes dans les différents postes. Par exemple, lors des élections communales du 20 novembre 2016, la représentativité des femmes dans les conseils communaux est passée de 927 femmes élues conseillères en 2009 à 2830 soit 25% d’élues. Ensuite, les nominations du 1er janvier au 31 décembre 2017 ont été de 203 femmes sur 785 nominations au total soit 25% de femmes. Enfin, le gouvernement de septembre 2018 comptait 11 femmes ministres sur un total de 32 et pour la dernière législature, il n’y avait que 41 femmes députées sur un total de 147 ». Ces exemples prouvent que la représentation des femmes dans les instances politiques a toujours du chemin à faire, de l’avis de notre interlocutrice.
Wanep Mali, le Réseau Ouest Africain pour l’Edification de la paix, œuvre d’arrache-pied à son niveau, pour une application totale de cette loi. Toujours pour Gnagna Traoré, Wanep fait des plaidoiries pour l’application stricte de la loi n°2015-052. Wanep mène aussi des campagnes de sensibilisation pour que la population malienne dans son ensemble, puisse s’imprégner de cette loi.
Quelles sont les difficultés dans l’application de la loi n° 052?
Selon Gnagna Traoré, c’est au niveau des nominations qu’elle constate assez de difficultés : « beaucoup de personnes pensent que les femmes n’ont pas de compétences pour occuper les postes de responsabilité » déclare-t-elle.
Autre difficulté, la méconnaissance de la loi n°2015-052, comme un moyen pour promouvoir le genre dans l’accès aux fonctions nominatives et électives, des femmes elles-mêmes.
A savoir si elle connaissait la loi sur le genre, Oumou Coulibaly, vendeuse au marché de Sébénikoro, de nous répondre : « la loi n°2015-052, c’est quelle loi encore, je ne connais pas cette loi ». Tout comme Oumou, Awa Diarra, vigile dans une société de surveillance et de gardiennage, de nous répondre: « n’eut été votre question, je ne savais pas qu’il existait une loi pour promouvoir l’accès des femmes aux postes nominatifs et électifs ».
Comment réussir à appliquer pleinement cette loi ?
Selon Gnagna Traoré, pour une application stricte de cette loi, il faut mettre particulièrement un annuaire à la disposition du gouvernement : « un annuaire où l’on retrouve les noms des femmes avec leurs compétences. Ce document pourrait aider nos autorités à choisir les femmes pour l’accès à des postes nominatifs » souligne-t-elle.
Il faut aussi vulgariser la loi n°2015-052 pour que toutes les femmes du Mali puissent connaître l’existence de cette loi. « Je pense que l’application de ces mesures pourra être un moyen pour l’atteinte du quota des 30% de femmes aux postes nominatifs. » pense Gnagna Traoré.
Si la loi n°2015-052 n’existait pas, il fallait la créer. La participation des femmes à la vie politique reste encore tributaire de facteurs d’ordre social et pratique. L’effectivité de la loi sur le quota se trouve confrontée à la dure réalité du faible niveau d’instruction des femmes, ce qui limite considérablement le nombre de femmes leaders et leur impact sur les politiques de développement.
Mamadou Kéita